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Caucase et hauts talons

  • didier turcan
  • 12 sept. 2013
  • 2 min de lecture

Elles forment comme une immense vasque de flammes perpétuelles et immobiles. Elles rappellent que nous sommes au pays du zoroastrisme….. et du pétrole. Les Flame Towers de l’architecte britannique Barry Hugues sont devenues l’emblème de Bakou, la capitale de l’Azerbaïdjan.

Mehriban Alieva, la très puissante épouse du président élu, a la charge de soigner l’image de Bakou à l’étranger. Elle dispose pour cela de moyens considérables qui lui permettent de mener à travers le monde qui compte des actions culturelles de grand prestige. A Rome ou à Paris, elle pilote une offensive médiatique tous azimuts visant à associer de nombreuses personnalités cosmopolites du spectacle et des affaires à la promotion du nouveau visage de Bakou.

Ce jour d’août 2013, elle avait rendez-vous au restaurant du Four Seasons, un hôtel style Beaux-Arts, avenue Neftchitar, avec un universitaire français, spécialiste du droit des marques qui devait intervenir le soir même à l’occasion d’une conférence donnée au Centre des congrès Guedar Aliev. Au menu du déjeuner, la stratégie branding de la capitale qui devait affronter de nouveaux challenges.

Les enjeux du programme urbanistique Baku White City (BWC), sur les friches industrielles de l’avenue des Ouvriers du Pétrole, ne supporteraient aucune fausse note. Les installations portuaires et les derricks y feraient bientôt place aux réalisations architecturales les plus audacieuses, voire franchement déjantées. La capitale n’en était pas à son coup d’essai question urbanisme décalé. Mais cette fois-ci, le pari était risqué et les autorités locales étaient bien décidées à ce que Bakou entrât dans le vocabulaire courant des investisseurs internationaux pour désigner l’exemple même d’une transformation urbaine réussie.

« Mais nous ne voulons pas être comparés à Dubaï », martèle sans cesse Mehriban. Dans un passé encore récent, Bakou n’a pas hésité à emprunter à Londres ses taxis et à Paris ses kiosques à journaux et ses lampadaires Napoléon III. Elle cède à présent, avec tous les moyens financiers conséquents, à cette mode de parvenus qui fait appel aux architectes de renom sans l’intervention desquels les villes n’ont pas le sentiment de s’inscrire dans le siècle naissant. Une sorte de passage obligé, semble-t-il.

L’histoire et la singularité de cette rive de la Caspienne mériteraient peut-être mieux que ces concepteurs sans frontières qui édifient partout la même ville. Et qui reproduisent leurs flèches en béton vendues comme autant de traits de génie. Mais Bakou est bien plus que cette ville qui, la nuit venue, scintille façon casino. Son récit est ancien qui plonge dans celui des montagnes du Caucase. Elle est la capitale d’un Etat qui a payé cher sa récente indépendance mais qui n’a aucune croisade à mener, hormis celle de son développement économique et touristique. S’est-il dit, au cours de ce déjeuner, que Bakou ne doit pas chercher à singer les autres villes mais à puiser dans son propre ADN les ressorts de son essor prochain ?

turcan@covos.fr

 
 
 

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