1, 2, 3 pouvoir
- didier turcan
- 3 oct. 2016
- 3 min de lecture
S’il est un programme politique, présidentiel ou législatif, susceptible de faire l’objet d’un large consensus, c’est bien celui qui serait architecturé autour de ces trois questions essentielles que sont l’emploi, la santé et la sécurité. Un programme simplement énoncé, sans détours, qui renverrait aux problématiques quotidiennes de tout citoyen sollicité dans le cadre d’élections nationales. Lequel citoyen veut pouvoir travailler pour vivre, vivre en bonne santé le plus longtemps possible et vivre en toute sécurité en tous points du territoire.
. Moi, j’attends de l’Etat qu’il me donne la possibilité de travailler sans être mon employeur, d’être soigné quand je suis malade sans être mon médecin et qu’il assure ma sécurité, et là directement car il en va là de sa raison d’être. Point barre.
Voilà qui est sobrement dit.
Mais c’est sans doute parce qu’un tel programme serait trop simple qu’il n’est finalement assumé par personne. Et qu’on lui préfère, lors des débats, des sujets plus sophistiqués, d’importance cosmique ou de sensibilité partisane. Plus ou moins de centrales nucléaires ? Franchement, qui est en mesure de s’exprimer avec compétence là-dessus ? La dette de la France ? C’est une affaire de gestionnaire, légitime sans doute mais qui ne peut sérieusement constituer un argument électoral. Même chose pour les déficits publics de l’Etat ou de la sécurité sociale : dès lors que l’on commence à parler de milliards d’euros, plus personne n’écoute. Irresponsable ? Non, humain. A chacun son échelle.
On peut être soucieux de la place de la France dans l’Europe ou de son prestige international mais ne pas omettre que le citoyen français évolue chaque jour dans un territoire délimité par des frontières invisibles mais sûres et reconnues. Auxquelles on le renvoie sans cesse et notamment à l’occasion des élections locales, qu’elles soient régionales ou nationales.

Concernant l’emploi, on se lance au visage les chiffres du chômage quand ils sont mauvais mais qu’on revendique quand ils sont bons. On ne perçoit pas toujours, il est vrai, en quoi la représentation nationale, le gouvernement ou l’institution présidentielle sont vraiment responsables dans cette affaire-là. La situation de l’emploi dépend de la santé des entreprises et l’Etat doit donc assurer les meilleures conditions possibles pour que les entreprises embauchent. Lesquelles ne demandent que cela. Et l’Etat peut alors agir sur la fiscalité, la législation sociale, la réglementation commerciale, l’accès au crédit et sur quantité d’autres matières en sa qualité d’autorité de régulation. En soi, cette seule question mériterait qu’une campagne entière lui soit dédiée.
La santé est le second sujet de préoccupation des français. Une fois de plus, elle sera superbement ignorée des discours et de la campagne pour la prochaine présidentielle. A croire que les questions de santé font peur aux élus comme aux électeurs alors même que parler santé n’est pas parler médecine mais administration, territorialisation, recherche, accès aux soins. Phénomène absolument incompréhensible, la loi HPST du 21 juillet 2009 n’est même plus revendiquée par l’actuelle opposition comme une tentative de réforme significative en la matière du précédent quinquennat alors pourtant qu’elle est un des textes les plus audacieux de ces trente dernières années.
Enfin, les questions de sécurité sont toujours difficilement abordables sans se marquer politiquement, d’un bord à l’autre. Une incongruité typiquement française. Pourtant, le pourcentage des électeurs qui souhaitent vivre en sécurité et assurer la sécurité à leurs proches est connu : 100 %. Il devrait bien être facile de dégager une majorité quand bien même la question risque toujours de prêter à controverse ou d’être détournée.
Non, décidément, trop simple tout cela, trop évident. Pas professionnel. Trop terre à terre. Sauf à considérer que le clivage droite gauche est un référentiel désuet, que les hommes politiques actuels sont dans leur comportement un rien dépassés et qu’ils doivent accoucher à présent de l’homo politicus du 21e siècle qui viendrait nous rappeler, sans emphase, qu’on ne s élève jamais autant qu’en traitant simplement des choses complexes.
turcan@valauval.fr
Image: Oncle Sam, 2010 © Bernard Pras
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